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Conférencier : Vincent Banssillon Compte-rendu extrait du Bulletin n° 253 de juillet 2011 |
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Samedi 16 avril 2011 après-midi, un soleil radieux inonde notre Cité, et pourtant de nombreuses fenottes et de nombreux gones ont choisi de venir à la salle de la Ficelle écouter notre conférencier. En effet, le Docteur Vincent Banssillon nous avait promis un thème peu connu « Lyon capitale de l'anarchie, 1860-1894 », sujet qu'il a décliné avec une grande virtuosité.
Au cours du XIXe,
la Révolution française s'est poursuivie partagée entre deux tendances :
- la tendance révolutionnaire bourgeoise, républicaine, anticléricale et
franc-maçonne qui donnera la gauche républicaine des années 1880 dominée
par Gambetta, Jules Favre et Jules Ferry.
- la tendance révolutionnaire ouvrière prolétarienne qui milite pour
l'abolition des classes sociales.
La tendance la plus activiste y est représentée par l'anarchisme.
L'anarchisme est un mouvement
d'idée et d'action dont le point de départ est une revendication d'existence
politique et sociale de la classe ouvrière. Elle s'est exprimée idéologiquement
avec Proudhon, s'est structurée avec Bakounine, et a pu se réaliser en partie par
la Commune.
L'anarchisme se divise en deux familles principales, l'anarchisme individualiste
prôné par Steiner et Proudhon et l'anarchisme collectiviste et activiste prôné
par Bakounine et Kropotkine.
Lyon joua le rôle de capitale
de l'anarchie en France de 1870 à 1890, après son apparition en 1860. L'anarchie
trouve à Lyon les conditions permettant son implantation et son développement.
Lyon est au début du XIXe la première ville industrielle de France
grâce à la soie. Il existe une adéquation entre l'idéologie anarchique prônant
la révolte ouvrière et les mouvements ouvriers corporatistes avant la naissance
des syndicats.
Bakounine devait venir à Lyon pour appliquer ses théories et les faire connaître
aux Lyonnais, suivi plus tard par son successeur Kropotkine.
En 1830, Lyon est la deuxième
ville de France avec 134.000 habitants, mais la première ville ouvrière, la moitié
des habitants vivant du tissage de la soie.
Ce monde ouvrier vit dans des conditions difficiles mais il a une conscience politique,
une organisation professionnelle sous forme de mutuellisme et une organisation
politico-militaire.
Le soulèvement des canuts du 21 au 24 novembre 1831 fut dû à des problèmes
socio-économiques aboutissant à une revendication salariale. C'est le premier
soulèvement ouvrier de l'histoire.
Ensuite on assiste à l'implantation lyonnaise de l'Association Internationale
des Travailleurs (AIT), qui s'inspire largement des idées de Proudhon et
regroupe anarchistes, socialistes et radicaux.
Albert Richard prend une part active à l'AIT à Lyon et dans la région et prend
en main l'organisation.
L'affirmation de l'anarchie sur le plan local commence en 1869 quand une vague de grèves, dont la grève des Ovalistes, déferle sur la ville.
En 1870, devant le conflit
franco-allemand qui s'annonce, il faut opposer l'attitude de Marx à celle de
Bakounine. Marx prend parti pour la Prusse, alors que Bakounine reste fidèle
au bonapartisme.
La chute de l'Empire a des conséquences importantes. Le 4 septembre 1870,
après la capitulation de Sedan du 2 septembre, le gouvernement de la République
se réfugie à Tours et se trouve sans grande autorité, ce qui laisse une grande
autonomie aux communes. A Lyon est créé un Comité de salut public, avant celui
de Paris et de Marseille.
Le 15 septembre un conseil municipal est élu, et porte Hénon à la mairie. Une
période de troubles débute avec de nombreuses manifestations et des assassinats
tels que celui du commandant Arnaud, alors que le préfet Challemel-Lacour tente
de rétablir l'ordre.
Jusqu'en 1887 l'anarchisme lyonnais reste actif, perpétrant 14 attentats et
organisant 186 grèves.
La liste des attentats se termine à Lyon le dimanche 24 juin 1894 à 21h30 par
l'assassinat du Président Sadi Carnot par l'italien Sante Geronimo Caserio.
L'anarchie va sur le plan politique se trouver supplantée progressivement par le marxisme avec ses deux composantes socialiste et communiste qui vont s'opposer jusqu'à la séparation du congrès de Tours. La guerre de 14 lui portera un coup quasiment fatal.
Guy Valarcher