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La Croix-Rousse : son Boulevard, son Gros-Caillou
Conférence du 10 novembre 2007

 

Robert Luc
Robert Luc et Gérard Truchet.

Conférencier : Robert Luc

Compte-rendu extrait du Bulletin n° 243 d'avril 2008

Coucher de soleil
Déplacement du Gros Caillou
le 18 juin 2007.

 

Samedi 10 novembre nous recevions sur notre tabagnon un vrai gone, un Croix-Roussien pur sucre : Robert LUC. Durant plus d'une heure nous l'avons suivi pas à pas, sans quitter notre chaise, sur le Plateau de la Croix-Rousse. Il nous a donné maints renseignements sur le boulevard, le Gros-Caillou en passant par la crèche Saint-Bernard. Pour vous donner un aperçu de sa conférence, nous nous sommes permis de nous rendre sur son site afin d'en extirper quelques bribes et vous donner l'envie de vous y rendre à votre tour. Une façon d'en apprendre encore d'avantage : http://canutdelacroixrousse.blogspot.com.

A la Croix-Rousse, peut-être plus qu'ailleurs, nous adorons brouiller les cartes, faire que celui qui veut évoquer le passé du quartier se trouve confronté à de multiples obstacles, à de nombreuses fausses routes où une parcelle de vérité historique va se heurter à la part de légende, où les mots employés ne sont pas exactement ceux qu'il faudrait employer, où les légendes deviennent vérités, où la vérité se trouve relookée afin d'être conforme à l'idée qu'on s'en fait.

Les exemples sont nombreux. A commencer par le mot canut qui résulterait d'un jeu de mots digne de l'almanach Vermot « … tiens voilà des cannes... nues ! »
D'ailleurs dans quelques années peut-être modifiera-t-on cette expression en disant que les maîtres tisseurs lancèrent la mode du bermuda : « tiens leurs cannes sont nues ! ». Toujours à propos de canut, certains tisseurs du XXe siècle se mettaient en colère si on les traitait de « canuts ». Or force est de constater qu'en 1832 des maîtres tisseurs n'hésitaient pas à le revendiquer haut et fort ce terme, adjoignant même le qualificatif courageux à l'époque de Louis Philippe de : « Républicain ! ». Brouiller les cartes, ça nous connaît. En vrac : les traboules qui serviraient à protéger des intempéries les ballots de soie ; les métiers Jacquard installés dans les couvents de la Croix-Rousse ; les marchands-fabricants qui ne fabriquent rien, ils sont commerçants, la porte visible de la rue Aimée Boussange qui serait la porte principale d'entrée et de sortie de Lyon, alors que cette dernière était en haut de la rue des Pierres Plantées ; la place des Tapis qui serait le haut lieu de fabrication de cette pièce d'étoffé… alors qu'il s'agit de la partie herbeuse aux pieds des remparts ; et bientôt la rue du Mail sera consacrée rue où a été inventé le courrier électronique…

Le Gros-Caillou n'est pas épargné dans ce déluge de vraies fausses vérités. Récemment les fenottes et les gones s'indignent : « On a mis le Gros Caillou sur le 1er arrondissement ! C'est quasiment un hold-up ! » pétitionnent les habitants du 4e arrondissement. J'ai vu quelques sympathiques touristes Japonais poser un jour la main dessus en fermant les yeux. Comme sur le buste de Kardec au père Lachaize ! Quant à sa légende que d'autres font remonter à la nuit des temps, elle a été écrite par Emile Leroudier autour de 1930.

Je ne déteste pas que l'histoire soit parfois colorée de légendes, après tout je suis d'une génération où souvent l'anecdote, les déclarations approximatives et immortelles permettaient de se passionner pour elle. Mais de temps en temps, il ne faut pas hésiter à passer une couche de couleurs plus authentique plus conforme à la réalité. Cela n'enlève rien à l'intérêt de l'histoire et c'est pour le moins une marque de respect à l'égard de ceux qui nous ont précédés.

En 1512, Louis XII va décider de construire des remparts au nord de la ville en remplacement des fossés et des murs du quartier Terreaux. Il les verrait bien en bas des pentes mais le bourg Saint-Vincent se retrouverait hors des murs. Les autorités de l'époque proposent que ces remparts soient édifiés sur le rebord des pentes de ce que l'on nomme la montagne Saint-Sébastien. Le chantier va durer. Il faudra 25 ans. Ce mur fait 2 km environ, il est haut d'une dizaine de mètres et large de plus de 2 mètres. Il est borné à l'ouest par un bastion en forme de tour, celui de Saint-Jean, et à l'est par le bastion de Saint-Clair. Sur le versant côté Rhône le faîte du mur est transformé en escalier. Au XVIIe de nouveau des améliorations. L'ancienne porte Saint-Sébastien fait place à un bastion à l'intérieur duquel il y a un passage coudé et étroit et le pont-levis fait place à un pont en pierre.

Le 24 mars 1852, la Croix-Rousse n'est plus indépendante. Un décret de Louis Napoléon Bonaparte qui vient de faire son coup d'Etat le 2 décembre 1851 et qui deviendra Napoléon III un an après le 2 décembre 1852, vient de faire de ce faubourg le 4e arrondissement. Le 20 juin 1865, ce même Napoléon se fend d'une déclaration : « Les fortifications n'ont plus aucune raison d'être ; elles sont inutiles contre l'ennemi et nous ne sommes plus au temps où l'on se croyait obligé d'élever de redoutables défenses contre l'émeute. Un vaste boulevard planté témoignera de ma confiance dans le bon sens et le patriotisme lyonnais ».

Un conférencier et une conférence qui ont retenu toute notre attention et surtout, nous incitent ardemment à partir nous bambaner dans ce merveilleux quartier de Lyon.

Gérard Truchet

 


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